Depuis plusieurs années, la digitalisation des services bancaires est extrêmement utile et apporte de nombreux avantages tant pour les banques que pour de nombreux utilisateurs. Mais elle apporte aussi son lot de contraintes et de désagréments pour certaines personnes. La pandémie de la COVID-19 a entraîné l’accélération de cette digitalisation (paiements « sans contact », banques fermées, virements électroniques recommandés, achats en ligne,…). Cependant, selon une étude de la BCE, en 2019, les paiements en espèces représentaient encore 58% du nombre total de paiements effectués en Belgique et ont pour vertu de favoriser les commerces de proximité. Reconnaissons que même avec la digitalisation, nous devons encore nous rendre dans notre banque pour certains services spécifiques.

Nous devons tout faire pour éviter le phénomène de « désertification bancaire » ou que le service bancaire soit potentiellement discriminant. La fracture numérique est sans conteste une véritable forme d’exclusion de la société d’un public plus fragile. Le service bancaire doit être universel. Trop de personnes ont encore besoin de pouvoir parler à un agent au guichet de leur banque. Trop de personnes ont encore besoin d’argent liquide et pas uniquement dans les grands centres commerciaux où l’on peut sans grand souci payer par carte bancaire. Dans les petites villes et les villages, les équipements nécessaires prévus sont parfois manquants et pour les commerçants de proximité, ces équipements entrainent un coût non négligeable.

La solution idéale serait de pouvoir offrir le choix aux citoyens : le choix de partir sur la digitalisation complète ou le choix de continuer avec de l’argent liquide… ou les deux. C’est une liberté individuelle.

Pour ces raisons, nous vous proposons d’adopter la motion ci-jointe.

L’objectif du projet BATOPIN (Belgian ATM OPtimization Initiative) établi par quatre grandes banques (ING, KBC, Belfius et BNP Paribas Fortis) prévoit de passer de 2.500 distributeurs à 650 ou 700 (diminution de quasi un quart) et, en ce qui concerne le nombre de guichets de banque, nous passerions de 5.800 à 2.500. Qu’en sera-t-il pour Andenne ? Il est pour nous impératif que les Villes et Communes qui connaissent bien leur population et leur territoire, soient associées à cette réflexion. Un article paru dans la DH de l’année dernière, évoquait même le fait que la Ville de Charleroi (pourtant la ville la plus peuplée de Wallonie) était délaissée par les banques… Et quid du projet parallèle JoFiCo (Argenta, Axa, Bpost, Crelan et VDK bank) ? Quelle association ou quelles collaborations possibles avec cet autre projet ?

En tant que municipalistes, nous souhaitons nous assurer que des banques et des distributeurs resteront accessibles à toutes celles et tous ceux qui le souhaitent, et ce, même en dehors de grands centres urbains.

📺 Écouter le point discuté en séance

Le point est discuté à partir de 44:43 dans la vidéo ci-dessous.

Motion

Objet :        Fermeture des distributeurs automatiques de billets de banques – Motion

         Le Conseil,

         En séance publique,

Considérant les profonds changements au niveau des relations entre les banques et leurs clients, les consommateurs ayant été incités à réaliser eux-mêmes de manière digitale un nombre croissant d’opérations bancaires, d’abord via les automates dans les agences, ensuite sur leur ordinateur personnel (PC Banking) ou leur smartphone ;

Considérant qu’en concomitance, le secteur bancaire a mis en place un plan drastique d’économies, que des restructurations importantes ont été menées durant la période comprise entre 2016 et 2020 et que de nombreuses annonces ont eu lieu concernant des suppressions d’emploi dans le secteur bancaire : 3.150 emplois de moins chez ING, 1.400 chez KBC, 2.200 chez BNP Paribas Fortis.  Entre 2000 et 2018, on est ainsi passé de 67.709 employés à 50.661 employés dans le secteur ;

Considérant la fréquence des annonces de fermetures d’agences ou de distributeurs de billets laissant de facto des zones territoriales du pays à l’état de désert bancaire ;

Considérant qu’en province de NAMUR, selon les chiffres de FEBELFIN, 32 agences ont disparu en seulement deux ans (entre fin 2017 et fin 2019) ;

Considérant que les banques ont l’intention de supprimer 2.000 terminaux bancaires ;

Considérant qu’en dix ans (entre 2008 et 2018), le nombre d’agences est passé de 8.259 à 5.126, soit une diminution de 38 % et qu’en trois ans (2016-2019), 927 guichets automatiques ont disparu en Belgique selon les chiffres de FEBELFIN ;

Considérant les nouvelles annonces de fermetures d’agences pour 2021 par ING (62 dont une à Andenne) et par Belfius (14) ;

Considérant les annonces récentes par la filiale bancaire de BPOST relatives au retrait des distributeurs de billets dans diverses communes ;

Considérant la reprise des activités de cette filiale par BNP Paribas Fortis et de l’inquiétude que cela peut engendrer quant au maintien, dans le cadre d’une obligation de services publics, d’un service bancaire de base et de proximité ;

Considérant toutefois que cette restructuration globale du paysage bancaire n’empêche pas les frais bancaires d’augmenter et que, dans la plupart des grands établissements, les frais pour les virements « papier » sont passés en une dizaine d’années d’une fourchette de 30 à 35 centimes d’euro à 1,25 voire 1,50 euro, que l’impression des extraits de comptes devient payante et que, dans certains cas, les retraits d’argent aux distributeurs de billets peuvent être facturés 50 centimes d’euro ;

Considérant pourtant que les banques ont dégagé, en 2018, un résultat après impôt de 6,2 milliards d’euros ;

Considérant que selon une étude de la Fondation Roi Baudouin parue en 2020, 40 % de la population belge a de faibles connaissances numériques, un chiffre qui monte à 75 % chez les personnes plus âgées, les personnes à faible revenu et celles ayant un niveau de diplôme peu élevé. Une nouvelle forme d’exclusion bancaire voit donc le jour et la fracture numérique touche un cinquième de la population dont le ménage ne disposant que d’un faible revenu ;

Considérant la question de la responsabilité sociétale, notamment en matière d’intérêt général ;

Considérant qu’une nouvelle forme d’exclusion bancaire voit le jour et que, selon les derniers chiffres disponibles, la fracture numérique touche un cinquième de la population dont le ménage ne dispose que d’un faible revenu, un quart de personnes n’ayant qu’un faible niveau d’éducation et un quart des personnes entre 55 et 74 ans ;

Considérant qu’aujourd’hui les exclus de la digitalisation subissent la double peine : non seulement ils ne peuvent plus accéder aux services bancaires à proximité de leur domicile mais, de plus, ils doivent payer beaucoup plus cher en devant se déplacer plus
loin ;

Considérant que le phénomène de la fermeture d’agences bancaires et de la suppression de distributeurs de billets touche en particulier les communes rurales ou les plus pauvres du pays et y affecte en conséquence le tissu commercial ainsi que l’attractivité de ces communes ;

Considérant qu’il n’appartient pas aux communes de financer ou de participer au financement du maintien de distributeurs de billets de banque sur leur territoire et de pallier ainsi au désinvestissement anormal des services bancaires à leur clientèle; en effet, il ne faut pas perdre de vue que c’est aux banques elles-mêmes qu’incombe la responsabilité d’offrir à la population un service de qualité ;

Considérant que la faculté de pouvoir payer en liquide doit demeurer un choix ;

Considérant qu’il faut garantir une présence minimale de distributeurs de billets sur tout le territoire belge et préserver des agences bancaires au cœur des villages et communes de la Province de NAMUR afin que la population qui y réside soit traitée de manière équitable ;

Considérant qu’il faut permettre à chaque citoyen d’avoir aisément accès à un distributeur de billets à proximité de son domicile ;

Considérant que la mission d’offrir à la population une présence minimale de distributeurs de billets sur tout le territoire du Royaume revient aux banques ;

Considérant que le projet BATOPIN développé par quatre grandes banques belges ne permettra plus d’effectuer certaines opérations tels les virements, la consultation des soldes, l’impression d’extraits, etc ;

DÉCIDE (À L’UNANIMITÉ) :

De demander, dans le cadre de leurs compétences respectives, au Parlement fédéral, au Parlement wallon, au Gouvernement fédéral et au Gouvernement wallon :

  • d’étudier et mettre en place toutes les mesures et mécanismes destinés à garantir une répartition équilibrée des distributeurs automatiques de billets de banque dans les communes de Wallonie, et dans le cas présent, de la Province de NAMUR ;
  • de poursuivre le dialogue avec le secteur bancaire pour le maintien d’un nombre suffisant et justement réparti d’agences bancaires de proximité, en particulier pour les zones rurales en ce compris l’ensemble du territoire de la Province de NAMUR ;
  • que le projet BATOPIN qui concerne très concrètement les suppressions de terminaux multifonctions actuels, soit suspendu ;
  • qu’une conférence interministérielle « économie» réunisse toutes les parties concernées (communes, associations de consommateurs et de seniors, etc.) en vue d’élaborer une charte du service bancaire universel, incluant les opérations de base : retraits d’argent, virements, consultation des soldes, impression des extraits, etc.
Étienne Sermon

Motion déposée au conseil communal du 26 avril 2021 conjointement avec la majorité.

Étienne Sermon
Conseiller communal

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